Journaliste ex-otage : Après la célébrité, la liberté
Un homme simple, réservé, encore
marqué par ce triste évènement qui, deux ans après sa libération, se rend à
l’évidence : « Je ne pourrais plus mettre les pieds en Irak ».
La raison d’un homme l’a emportée devant sa passion pour le Proche et le
Moyen-Orient : « Cette mésaventure fait partie des risques du
métier. Aujourd’hui, les journalistes qui sont sur place, travaillent avec des
gardes du corps. Moi, ça ne m’intéresse pas ». Depuis 2005, il occupe
un poste en CDI à France Inter, un média qui n’envoie plus personne à
Bagdad : « Ces histoires ont été un choc pour la profession ».
Mais pas seulement.
Nombreux sont ceux qui, profondément sensibilisés par ce drame humain, ont surmonté leur tristesse dans un soutien au quotidien qui a suscité un élan de solidarité générale. La capture de Christian Chesnot et de son confrère Georges Malbrunot, est à l’origine d’une mobilisation inédite en France : « On comprenait cette sensibilisation mais pour nous c’était tellement irréel. Notre seul rapport à ce type d’événement, c’était la prise d’otage de Kauffmann* au Liban, dit-il. Nous savions cependant que ça faisait du bruit parce que des bribes nous arrivaient ».
C’est seulement à son arrivée sur le tarmac de l’aéroport de Villacoublay, que Christian Chesnot mesure l’ampleur de la situation : « C’est un choc pour nous, on ne s’attend pas à çà. C’est seulement avec le ministre qu’on commence à réaliser ».
Sonné mais libéré. Les deux confrères comprennent que les nombreux soutiens ont été positifs et « utiles pour empêcher l’exécution ». Christian Chesnot est soulagé, « le rescapé » se considère même « privilégié » d’aspirer à une nouvelle liberté. Il se soumet aux déclarations, « par devoir moral, explique-t-il. Tout le monde m’a soutenu, (…) ne pas répondre à leurs questions aurait été anormal ». Un homme sensible, humain, toujours à l’écoute et considérablement perturbé : « A notre arrivée, je ne peux pas m’échapper ; j’appartiens aux gens, mais ça part d’un bon sentiment ».
« Le Moyen-Orient est
amplifié par les médias »
Pendant quatre mois, cette prise
d’otages en Irak se trouve au cœur de l’actualité. « Le journaliste qui
travaille dans un pays en guerre a un statut particulier, il incarne le
reporter de terrain qui va au front, qui joue un grand rôle pour l’information ».
C’est la raison pour laquelle, selon l’ex-otage, la mobilisation a été aussi
forte. « Le journaliste est au
service du citoyen. Par conséquent, il fait partie intégrante de la
démocratie », ajoute-t-il.
Conscient de l’hyper puissance médiatique
et de son rôle essentiel dans sa libération, le journaliste et spécialiste du
Moyen-Orient précise que « cette région sensible est assez amplifiée
par les médias. Je n’étais pas dans l’optique d’un correspondant de guerre
comme cela a pu être interprété. Contrairement aux photographes et aux
cameraman qui, eux, sont aux premières loges ».
C’est pourtant bien Christian Chesnot qui a balayé ces longs mois de détention à la force du moral. C’est encore plus douloureux de se dire que cette capture aurait très bien pu ne pas avoir lieu : « C’était un rapt d’opportunité, nous n’avons pas eu de chance. Nous serions passés une heure plus tard, jamais cela nous serait arrivé ».
* Journaliste détenu en otage au Liban de mai 1985 à mai 1988
Christian Chesnot en quelques dates
40 ans – Journaliste, spécialiste du Proche et Moyen-Orient
1989 : Diplômé d’IEP (Institut d’Etudes
Politiques) et du CFJ (Centre de formations des journalistes)
1989 à 1992 : Journaliste auprès du quotidien
francophone Le Progrès égyptien au Caire
1993 à 1999 : Collaborateur pour différents médias (Le Point, France Inter, France Info, France Culture, Le Monde diplomatique)
1999 : Correspondant-pigiste à Amman (Jordanie). Christian Chesnot couvre les évènements en Syrie et au Liban
2002 : Sortie de l’ouvrage Palestiniens 1948 - 1998
20 août 2004 : Enlevé et pris en otage par l’armée islamique en Irak, avec son confrère Georges Malbrunot (RFI, Radio France) et son guide syrien, Mohammed Al Joundi
21 décembre 2004 :
Libération des deux otages
Mai 2005 : Sortie de l’ouvrage Mémoires d’otages, notre contre-enquête
Depuis 2005 : Journaliste à France Inter (service étranger)